“La France Forte”: Pourquoi Sarkozy reprend-t-il le slogan des battus célèbres de la présidentielle ?

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Le slogan de Nicolas Sarkozy pour sa campagne présidentielle de 2012 semble, comme beaucoup d’autres choses, avoir été choisi à dessein pour se placer dans une perspective de défaite.

 Ce slogan n’est en effet pas seulement grotesque pour un président de la République dont le mandat s’achève sur un désastre à peu près complet dans tous les domaines, et sur un degré d’avilissement et d’asservissement à l’étranger jamais atteint en France depuis le gouvernement de Vichy.

Nicolas Sarkozy, qui nous avait promis “la France d’après” en 2007, nous rend cinq ans après la France plus faible, plus désespérée et plus humiliée qu’elle l’a jamais été depuis sept décennies. Et c’est ce président, qui a affaibli la France comme jamais, qui a le culot de nous promettre maintenant de la rendre forte !

Ce choix d’un slogan particulièrement inapproprié et provocateur, trouve sans doute son explication dans les méandres tortueux de la psychologie de Sarkozy. Car, comme certains organes de presse l’ont remarqué ces jours-ci, il se trouve que ce slogan fut celui qui a été utilisé par les deux battus les plus célèbres de l’histoire de nos élections présidentielles : Valéry Giscard d’Estaing et Lionel Jospin. 

La “France Forte” fut en effet le slogan retenu par Valéry Giscard d’Estaing pour sa tentative de réélection de 1981 :

 slogan la france forte giscard

Rappelons que Giscard fut battu par François Mitterrand à l’issue de cette campagne le 10 mai 1981 en ne récoltant que 48,24 % des suffrages exprimés (contre 51,76 % à son adversaire).

La “France Forte” fut aussi l’un des slogans utilisés par Lionel Jospin dans le cadre de sa campagne présidentielle, en avril 2002.

Lors d’une conférence de presse consacrée à son projet international, le 3 avril, le candidat socialiste, dont le slogan de campagne était “Présider autrement”, s’était exprimé debout derrière un pupitre où figurait  « Une France forte »  en rouge :

 slogan la france forte jospin

Rappelons que Jospin fut battu à la surprise générale dès le premier tour le 21 avril 2002, n’arrivant (avec 16,18 % des suffrages exprimés) qu’en troisième position, derrière Jacques Chirac (19,88 %) et Jean-Marie Le Pen (16,86 %).

CONCLUSION : ACTE INCONSCIENT OU ACTE DÉLIBÉRÉ ?

En choisissant à son tour ce slogan de “looser”, Nicolas Sarkozy a-t-il laissé parler son inconscient ?

 slogan la france forte sarkozy

À moins qu’il n’ait adressé un message codé aux plus malins, pour signifier qu’il ne fallait pas être dupe de toute cette mascarade : à savoir qu’il ne se présente que contraint et forcé, par les commanditaires euro-atlantistes, qui l’auraient sommé d’aller se faire battre face à François Hollande. Dans le but de donner aux électeurs français le sentiment qu’ils sont encore en démocratie.  

Cette volonté délibérée de perdre, comme un dernier service qu’il accepte de rendre aux forces extérieures qui avaient assuré sa carrière, est en tout cas le schéma que subodore, avec d’autres, Dominique de Villepin. Dans un récent entretien au magazine L’Express, l’ancien Premier ministre confie en effet avoir l’impression que Sarkozy « n’y croit plus beaucoup » , affirme que Sarkozy va perdre et dresse le constat suivant : « On sent chez lui comme une forme de résignation, comme s’il n’avait pas d’autre possibilité que d’être candidat ». [source]

Vue sous cet angle, la fin de partie de Sarkozy – qui préfigure probablement un passage “dans le privé” et sans doute Outre-Atlantique dès cet été – revêt une dimension pathétique. Comme un personnage d’un roman de Dostoïevski aimant à se vautrer dans sa propre humiliation, Nicolas Sarkozy achèverait son passage dans nos livres d’histoire en endossant le rôle d’un histrion acceptant sans broncher d’être délibérément envoyé au casse-pipes par ses commanditaires.

Dans cette atmosphère irrespirable qu’est devenue la scène politique française – et que ne changerait en rien l’élection de François Hollande -, il est vraiment grand temps de passer à autre chose.

François ASSELINEAU

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